Vers la flamme : Le cataclysme de Scriabine
Quand il n’immerge pas sa songerie dans « Un enterrement à Ornans » de Gustave Courbet ou au milieu des jardins de Pierre Bonnard, le poète François Migeot vagabonde du côté de la musique, qu’il écoute jusqu’au plus secret surgissement de son expression.

Alexandre Scriabin (1872-1915). MANUEL COHEN / MANUEL COHEN VIA AFP
Il y avait eu Brahms et l’admirable recueil « Clair-obscur » (2013). Voici « Vers la flamme », qui suit à juste distance les soubresauts névrotiques de la courte pièce pour piano éponyme du compositeur russe Alexandre Scriabine. Ces visions d’effroi, ces hurlements, ce cataclysme final éclairent « toutes ces faces épuisées, vidées de l’heure qui les portait, reculent en avant, dans le cœur où le nœud se resserre ». Le poète tamise la réception trop drue des émotions pour mieux « ranimer l’espace évanoui avant que le sang ne sèche ». Et le lecteur, pris dans les drapés somptueux de cette langue, laisse « le regard s’abandonner au défilé d’empreintes ».