Par Lucas Burel
Publié le , mis à jour le
Encore une fois, le milliardaire Pierre-Edouard Stérin n’a pas honoré sa convocation par les députés à l’Assemblée nationale. Une autre date lui a été proposée et des poursuites sont désormais sur la table en cas de nouveau lapin.

Chaise vide, laissée par Pierre-Edouard Stérin, le 14 mai 2025 à l’Assemblée nationale. THOMAS SAMSON/AFP
Une chaise vide et toujours pas de Pierre-Edouard Stérin dans les couloirs du Palais-Bourbon. Les caméras étaient pourtant présentes en nombre, ce mercredi 14 mai, pour observer l’homme d’affaires, dont la discrétion est inversement proportionnelle aux ambitions politiques : rien de moins que la victoire de la droite dure ou de l’extrême droite en 2027. Mais surprise : après avoir esquivé, fin avril, sa première convocation devant la commission d’enquête parlementaire consacrée à l’organisation des élections en France, le saint patron des réacs, installé en Belgique, n’a pas daigné quitter son exil fiscal belge pour répondre aux questions de la représentation nationale.
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Le milliardaire, qui devait être interrogé sur son projet politique « Périclès », a justifié son absence auprès des élus en évoquant des raisons de sécurité et les menaces de mort dont il dit être la victime. Selon un communiqué de ses équipes, dont « le Nouvel Obs » a pris connaissance, « ces menaces, qu’il prend très au sérieux, présentent un risque significatif pour son intégrité physique et sa sécurité. Ces menaces de mort feront l’objet de poursuites judiciaires. Les équipes en charge de sa sécurité lui ont indiqué les mesures nécessaires à prendre, notamment de ne pas se rendre physiquement à un rendez-vous dont la date et le lieu sont rendus publics ».
Insuffisant, pour la commission d’enquête, et son président Thomas Cazenave, député Ensemble pour la République de Gironde, qui a dénoncé une « manœuvre dilatoire » et une attitude « pas respectueuse ». Une nouvelle date de convocation, fixée au 20 mai à 11 heures, va être adressée à l’homme d’affaires. Il a été acté que s’il ne se présentait pas physiquement face aux élus à cette date, la présidence de la commission saisirait le procureur de la République, ouvrant la voie à des poursuites à l’encontre de Pierre-Edouard Stérin : deux ans d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende.
Echanges laborieux
« Nous avons été patients… » a aussi rappelé face à la presse le député de Gironde, flanqué du rapporteur de la commission, l’insoumis Antoine Léaument. Car tout semblait avoir été fait pour permettre l’audition prévue ce jour, ont insisté les élus : premiers contacts avec Stérin dès le 10 avril, puis, quelques jours plus tard, une première proposition de date, restée sans réponse. Avait suivi un courrier avec accusé de réception pour s’accorder sur le 23 avril… mais le fondateur de Smartbox avait annoncé être indisponible à la veille de cette convocation. Les échanges s’étaient encore prolongés pour arrêter laborieusement la date de ce mercredi 14 mai.
Et puis patatras, a détaillé le député Thomas Cazenave : mardi, à 12h57, soit moins de vingt-quatre heures avant l’audition, Stérin évoque désormais des risques de sécurité et sollicite une visioconférence. Trop compliquée à organiser, estime la commission, qui lui assure une première fois qu’il n’a rien à craindre dans l’enceinte de l’Assemblée nationale, où les personnalités publiques, y compris celles menacées de mort, sont légion. Nouveau message de Stérin à 21h25 pour confirmer qu’il se dégonfle et ne se rendra pas à Paris le lendemain. À 23h17, Thomas Cazenave confirme une dernière fois à Stérin qu’il est toujours attendu le lendemain à l’Assemblée et que « l’ensemble des dispositions nécessaires pour sa sécurité sont prises ». Sans succès.
La semaine dernière, l’audition d’Arnaud Rérolle, l’homme de confiance à qui Stérin a confié Périclès, avait parfois ressemblé à un tour de chauffe. L’intéressé bottant en touche à plusieurs reprises et renvoyant à plus tard, et à son milliardaire de patron, les questions des parlementaires. Lesquelles pourraient être résumées ainsi : à quoi joue Pierre-Edouard Stérin, lui qui prétend mettre sa fortune personnelle au service de ses idées réactionnaires pour 2027 ? Et surtout, agit-il dans le cadre légal ? Mais depuis ce mercredi, une autre question s’impose : a-t-il vraiment l’intention de répondre un jour aux députés ?