Le re-onboarding : Un enjeu essentiel pour la réintégration des collaborateurs
Dans la famille des processus RH, il y a bien sûr l’onboarding – soit l’accueil des nouveaux embauchés, qui s’est fait une place de choix ces dernières années parmi les bonnes pratiques des entreprises. De nombreuses organisations ont compris l’intérêt stratégique de faciliter l’intégration des salariés fraîchement arrivés. En revanche, son « petit frère », le re-onboarding, lui, en est encore à ses prémices. Le principe ? Accompagner le retour d’un collaborateur qui a été absent pendant une longue durée, quelle qu’en soit la cause (arrêt maladie, congé maternité ou parental, période de formation, année sabbatique, etc.).
« Pour le moment, c’est plutôt un impensé et l’encadrement de proximité, qui est en première ligne pour prendre en charge ce sujet-là, n’est pas forcément formé à ce type de situation, observe Stéphan Pezé, professeur en sciences de gestion à l’université Toulouse Capitole et auteur d’un guide sur la question. La tentation est grande de faire comme si de rien n’était, autant par peur de mal faire que par méconnaissance de la posture à adopter… Mais ce n’est pas un événement anodin comme un retour de congé ! »
Le contexte complexe du re-onboarding
Le terrain est en effet particulièrement glissant. « C’est un contexte complexe qui touche à plusieurs dimensions : celle du collaborateur, celle de l’équipe et la sienne en tant que manageur, confirme la psychologue et coach Aurélie Durand, fondatrice du cabinet Ajadi. C’est un jeu d’équilibre qui peut être difficile. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut pas considérer que tout va redevenir comme avant sous prétexte que la personne connaît les lieux et reprend sa place. »
« En entreprise, tout va très vite et dès qu’on coupe le rythme de travail et le lien social et professionnel, on se retrouve rapidement en décalage – on est déjà submergé quand on part 3 ou 4 semaines en vacances, alors après un long arrêt, on peut facilement perdre pied, ajoute Albine Gasquet, directrice des opérations et du développement au sein du Groupe JLO et experte maintien dans l’emploi. Si l’employeur ne mesure pas bien ce qui se joue à ce moment-là, le risque est que le collaborateur se désengage, voire retourne en arrêt. »
Maintenir le lien avec le salarié
Ce n’est pas parce qu’un collaborateur est absent pour une longue durée qu’il ne fait plus partie des effectifs. « Hors de question de “débrancher” le salarié – en le retirant des mailing lists, par exemple – surtout sans l’en informer », relève Aurélie Durand. « C’est une question de reconnaissance : le salarié a besoin de savoir qu’il existe toujours aux yeux de l’entreprise, explique Albine Gasquet. »
Pendant des années, les employeurs ont eu en tête l’idée que, dès lors que le salarié était en arrêt, ils ne pouvaient pas garder le lien : c’est totalement faux (depuis 2021, un rendez-vous de liaison doit d’ailleurs être obligatoirement proposé au bout de 30 jours d’arrêt). Bien sûr, en fonction du motif et de la durée de l’absence, il faut voir quel est le meilleur interlocuteur (service RH, assistante sociale, manageur, etc.) pour assurer ce lien.
Attention toutefois : maintenir le contact ne signifie pas bombarder son collaborateur de SMS ni l’informer des moindres actualités du service ou, pire, le solliciter professionnellement. S’il se sent harcelé, le salarié pourrait, légitimement, porter plainte.
« Savoir ce qu’on peut dire ou ne pas dire, cela s’apprend, avertit l’experte maintien dans l’emploi. Il est interdit de mettre la pression, de culpabiliser ou de porter un jugement sur l’état de santé, même quand on s’entend bien avec la personne arrêtée. »
Prendre du recul sur la situation
Il est important que le manageur se questionne sur son « état d’esprit » à l’approche du retour du collaborateur, estime Aurélie Durand. « La clé, c’est de se recentrer sur son rôle, à savoir garantir l’efficacité collective et la qualité de vie au travail. »
Charge aussi au responsable d’avoir à l’œil les réactions des membres de son équipe. « Le collectif a souvent été impacté, car on ne remplace pas systématiquement quelqu’un qui est en arrêt. »
Anticiper le retour et prévoir un « plan de réintégration »
De la même manière que pour une nouvelle embauche, un retour de congé longue durée se prépare. Avant le jour J, un échange avec le manageur ou le responsable des ressources humaines permet déjà de faire un premier point et de lever les freins et inquiétudes.
Soigner l’accueil
Le jour effectif de la reprise est une étape clé à ne pas rater. « Faire revenir la personne un mercredi ou un jeudi est déjà une bonne option pour que la première semaine soit moins longue et donc moins éprouvante, préconise Stéphan Pezé. Idéalement, prévoyez à la fois un temps individuel avec le salarié et un moment de convivialité avec l’équipe. »
Assurer le suivi du collaborateur
Pendant une période à définir au cas par cas, il est important de rester à l’écoute du salarié pour s’assurer que son parcours de réintégration se passe au mieux.