En étant la première femme jugée pour « aide à l’avortement » depuis sa quasi-interdiction en Pologne en 2021, Justyna Wydrzynska est devenue un symbole de la lutte pour le droit des femmes dans son pays. Son procès en appel relance les débats sur sa condamnation et ravive l’espoir des jeunes militantes pro-IVG.
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La veille de son procès en appel, en janvier dernier, Justyna Wydrzyńska ne tient plus en place. « Je suis fatiguée. Très fatiguée. Je veux juste que toute cette histoire se termine », avoue-t-elle, assise au bureau de son association Abortion Dream Team, à Varsovie.
Il y a cinq ans, cette militante pro-IVG est venue en aide à une femme qui souhaitait avorter. « La jeune femme était enceinte de 12 semaines. Son mari n’était pas d’accord avec sa décision d’avorter. Elle avait si peur. Alors je lui ai donné mes propres pilules abortives », déroule-t-elle.
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Mais ce geste, considéré comme une « aide à l’avortement » depuis sa quasi-interdiction en Pologne en 2021, est passible de trois ans d’emprisonnement. En donnant cette pilule, la militante s’est engagée dans un bras de fer inédit avec l’Etat polonais.
« J’ai donné un visage à la lutte »
Si Justyna Wydrzyńska est venue en aide à la jeune femme, c’est parce qu’elle connaît bien sa situation. « Je vivais moi-même des violences physiques et psychologiques dans mon mariage. C’est pour ça que j’ai décidé de partager mes pilules avec elle », confie-t-elle. En tombant enceinte en 2006, elle réalise combien il est difficile d’accéder aux bonnes informations concernant l’IVG dans son pays.
« J’ai cherché des solutions et j’ai trouvé la pilule (abortive). J’ai compris que nous, les personnes qui tombons enceintes en Pologne, nous ne savions rien de tout ça ! »
Avec cette pilule abortive, facile à prendre et à moindre coût, la militante pense avoir trouvé la solution pour affronter des politiques toujours plus restrictives vis-à-vis de l’interruption volontaire de grossesse en Pologne. « J’ai donc décidé de partager mon expérience. Et en montrant que je suis celle qui a avorté, j’ai donné un visage à la lutte », poursuit-elle, convaincue de la force de sa parole et de celles de ses amies militantes.
« On peut avoir une vie après l’avortement »
C’est ainsi que Justyna Wydrzyńska s’est engagée dans près de vingt ans de lutte pour un meilleur accès à l’avortement. En 2016, à l’heure de la première « protestation noire », qui avait réuni des milliers de Polonaises dans les rues pour manifester contre le premier projet de loi menaçant le droit à l’avortement, elle décide de créer l’ONG Abortion Dream Team. L’association avait pour but de faire connaître la pilule abortive et accompagner les Polonaises dans leur choix d’avorter. Mais en octobre 2020, le tribunal constitutionnel polonais restreint définitivement l’avortement en supprimant son recours en cas de malformation du fœtus. Et avec cette loi, aider une femme à avorter devient un crime.
Cette quasi-interdiction, qui entrera en vigueur en janvier 2021, va motiver Justyna Wydrzyńska et Abortion Dream Team à étendre leur action au niveau européen. En ralliant le collectif Avortement sans Frontière, l’ONG finance et organise des voyages dans les pays voisins pour faciliter une interruption volontaire de grossesse. En 2024, 47 000 femmes ont ainsi pu avorter. « On peut avoir une vie après l’avortement. Une vie très bonne vie même, parce qu’on a décidé de notre propre futur », assume Justyna Wydrzyńska, sans jamais rien regretter de son parcours militant.
Pourtant, la militante reste très critique quant à l’avancée des droits des femmes en Pologne. Selon elle, les politiques progressistes de Donald Tusk ne sont que des promesses. Le Premier ministre, élu il y a deux ans, gouverne avec une très large coalition pour contrer l’extrême droite polonaise. « Depuis, la loi est la même. La situation dans les hôpitaux est la même. Et nous, on dépense toujours plus pour couvrir les coûts des avortements », confie-t-elle. « Tusk dit qu’il est désolé. Très bien. Mais il n’a pas les outils pour en finir avec cette affaire », conclut Justyna Wydrzyńska, convaincue d’avoir l’opinion publique à ses côtés.
« Un modèle pour toutes »
À présent, la militante se prépare à un énième face-à-face avec la justice. Le 30 janvier s’est tenu son procès en appel au tribunal de Varsovie. Les jeunes militantes réunies devant la Cour suprême sont nombreuses ce jour-là.
Les jeunes militantes sont venues nombreuses pour montrer leur soutien à Justyna Wydrzyńska le jour de son procès en appel, le 30 janvier 2025. EMMA LARBI
D’après elles, ce procès ne fait que relancer le combat de Justyna Wydrzyńska. « Elle ne lâche jamais l’affaire et continue d’aider les femmes. Et ça, ça m’inspire beaucoup ! » s’exclame Ania, devant le bâtiment moderne. Cette étudiante de la capitale porte farouchement une pancarte, sur laquelle on peut lire : « Condamnée pour avoir réagi à l’injustice ».
« Les Polonais ne se rendent pas compte à quel point c’est horrible. Aucune femme ne devrait être condamnée pour en aider une autre ! »
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Autour d’elles, une vingtaine de jeunes femmes clament leur soutien en chantant « hey, hey hey, avorter c’est ok ! ». Olga, la vingtaine, en fait partie. Elle s’implique dans la lutte « depuis le début » du procès.
« Pour moi, Justyna est une femme incroyable. C’est juste un modèle pour toutes ici. »
Elle attend la sortie de Justyna Wydrzyńska avec impatience. « On veut lui montrer que beaucoup de gens la supportent », finit-elle, avant de rejoindre la petite foule.
Olga et son amie tendent une pancarte où on peut lire « Quand l’œuf est-il devenu une poule ? » en Polonais, le 30 janvier 2025 à Varsovie. EMMA LARBI
Ce 30 janvier 2025, Justyna Wydrzyńska quitte le tribunal sans verdict, mais pleine d’espoir. Depuis, l’affaire a été renvoyée devant le tribunal du quartier de Praga, à Varsovie. Et si la date du nouveau procès n’est pas encore connue, l’opinion publique semble se ranger à ses côtés. D’après un sondage Ipsos mené sur le soutien à l’avortement dans le monde en 2023, 63 % des Polonais seraient favorables à la légalisation de l’IVG.
En étant la première femme jugée pour « aide à l’avortement » depuis sa quasi-interdiction en Pologne en 2021, Justyna Wydrzynska est devenue un symbole de la lutte pour le droit des femmes dans son pays. Son procès en appel relance les débats sur sa condamnation et ravive l’espoir des jeunes militantes pro-IVG.
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Il y a cinq ans, cette militante pro-IVG est venue en aide à une femme qui souhaitait avorter. « La jeune femme était enceinte de 12 semaines. Son mari n’était pas d’accord avec sa décision d’avorter. Elle avait si peur. Alors je lui ai donné mes propres pilules abortives », déroule-t-elle.
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Mais ce geste, considéré comme une « aide à l’avortement » depuis sa quasi-interdiction en Pologne en 2021, est passible de trois ans d’emprisonnement. En donnant cette pilule, la militante s’est engagée dans un bras de fer inédit avec l’Etat polonais.
« J’ai donné un visage à la lutte »
Si Justyna Wydrzyńska est venue en aide à la jeune femme, c’est parce qu’elle connaît bien sa situation. « Je vivais moi-même des violences physiques et psychologiques dans mon mariage. C’est pour ça que j’ai décidé de partager mes pilules avec elle », confie-t-elle. En tombant enceinte en 2006, elle réalise combien il est difficile d’accéder aux bonnes informations concernant l’IVG dans son pays.
« J’ai cherché des solutions et j’ai trouvé la pilule (abortive). J’ai compris que nous, les personnes qui tombons enceintes en Pologne, nous ne savions rien de tout ça ! »
Avec cette pilule abortive, facile à prendre et à moindre coût, la militante pense avoir trouvé la solution pour affronter des politiques toujours plus restrictives vis-à-vis de l’interruption volontaire de grossesse en Pologne. « J’ai donc décidé de partager mon expérience. Et en montrant que je suis celle qui a avorté, j’ai donné un visage à la lutte », poursuit-elle, convaincue de la force de sa parole et de celles de ses amies militantes.
« On peut avoir une vie après l’avortement »
C’est ainsi que Justyna Wydrzyńska s’est engagée dans près de vingt ans de lutte pour un meilleur accès à l’avortement. En 2016, à l’heure de la première « protestation noire », qui avait réuni des milliers de Polonaises dans les rues pour manifester contre le premier projet de loi menaçant le droit à l’avortement, elle décide de créer l’ONG Abortion Dream Team. L’association avait pour but de faire connaître la pilule abortive et accompagner les Polonaises dans leur choix d’avorter. Mais en octobre 2020, le tribunal constitutionnel polonais restreint définitivement l’avortement en supprimant son recours en cas de malformation du fœtus. Et avec cette loi, aider une femme à avorter devient un crime.
Cette quasi-interdiction, qui entrera en vigueur en janvier 2021, va motiver Justyna Wydrzyńska et Abortion Dream Team à étendre leur action au niveau européen. En ralliant le collectif Avortement sans Frontière, l’ONG finance et organise des voyages dans les pays voisins pour faciliter une interruption volontaire de grossesse. En 2024, 47 000 femmes ont ainsi pu avorter. « On peut avoir une vie après l’avortement. Une vie très bonne vie même, parce qu’on a décidé de notre propre futur », assume Justyna Wydrzyńska, sans jamais rien regretter de son parcours militant.
Pourtant, la militante reste très critique quant à l’avancée des droits des femmes en Pologne. Selon elle, les politiques progressistes de Donald Tusk ne sont que des promesses. Le Premier ministre, élu il y a deux ans, gouverne avec une très large coalition pour contrer l’extrême droite polonaise. « Depuis, la loi est la même. La situation dans les hôpitaux est la même. Et nous, on dépense toujours plus pour couvrir les coûts des avortements », confie-t-elle. « Tusk dit qu’il est désolé. Très bien. Mais il n’a pas les outils pour en finir avec cette affaire », conclut Justyna Wydrzyńska, convaincue d’avoir l’opinion publique à ses côtés.
« Un modèle pour toutes »
À présent, la militante se prépare à un énième face-à-face avec la justice. Le 30 janvier s’est tenu son procès en appel au tribunal de Varsovie. Les jeunes militantes réunies devant la Cour suprême sont nombreuses ce jour-là.
Les jeunes militantes sont venues nombreuses pour montrer leur soutien à Justyna Wydrzyńska le jour de son procès en appel, le 30 janvier 2025. EMMA LARBI
D’après elles, ce procès ne fait que relancer le combat de Justyna Wydrzyńska. « Elle ne lâche jamais l’affaire et continue d’aider les femmes. Et ça, ça m’inspire beaucoup ! » s’exclame Ania, devant le bâtiment moderne. Cette étudiante de la capitale porte farouchement une pancarte, sur laquelle on peut lire : « Condamnée pour avoir réagi à l’injustice ».
« Les Polonais ne se rendent pas compte à quel point c’est horrible. Aucune femme ne devrait être condamnée pour en aider une autre ! »
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Autour d’elles, une vingtaine de jeunes femmes clament leur soutien en chantant « hey, hey hey, avorter c’est ok ! ». Olga, la vingtaine, en fait partie. Elle s’implique dans la lutte « depuis le début » du procès.
« Pour moi, Justyna est une femme incroyable. C’est juste un modèle pour toutes ici. »
Elle attend la sortie de Justyna Wydrzyńska avec impatience. « On veut lui montrer que beaucoup de gens la supportent », finit-elle, avant de rejoindre la petite foule.
Olga et son amie tendent une pancarte où on peut lire « Quand l’œuf est-il devenu une poule ? » en Polonais, le 30 janvier 2025 à Varsovie. EMMA LARBI
Ce 30 janvier 2025, Justyna Wydrzyńska quitte le tribunal sans verdict, mais pleine d’espoir. Depuis, l’affaire a été renvoyée devant le tribunal du quartier de Praga, à Varsovie. Et si la date du nouveau procès n’est pas encore connue, l’opinion publique semble se ranger à ses côtés. D’après un sondage Ipsos mené sur le soutien à l’avortement dans le monde en 2023, 63 % des Polonais seraient favorables à la légalisation de l’IVG.
En étant la première femme jugée pour « aide à l’avortement » depuis sa quasi-interdiction en Pologne en 2021, Justyna Wydrzynska est devenue un symbole de la lutte pour le droit des femmes dans son pays. Son procès en appel relance les débats sur sa condamnation et ravive l’espoir des jeunes militantes pro-IVG.
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Il y a cinq ans, cette militante pro-IVG est venue en aide à une femme qui souhaitait avorter. « La jeune femme était enceinte de 12 semaines. Son mari n’était pas d’accord avec sa décision d’avorter. Elle avait si peur. Alors je lui ai donné mes propres pilules abortives », déroule-t-elle.
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Mais ce geste, considéré comme une « aide à l’avortement » depuis sa quasi-interdiction en Pologne en 2021, est passible de trois ans d’emprisonnement. En donnant cette pilule, la militante s’est engagée dans un bras de fer inédit avec l’Etat polonais.
« J’ai donné un visage à la lutte »
Si Justyna Wydrzyńska est venue en aide à la jeune femme, c’est parce qu’elle connaît bien sa situation. « Je vivais moi-même des violences physiques et psychologiques dans mon mariage. C’est pour ça que j’ai décidé de partager mes pilules avec elle », confie-t-elle. En tombant enceinte en 2006, elle réalise combien il est difficile d’accéder aux bonnes informations concernant l’IVG dans son pays.
« J’ai cherché des solutions et j’ai trouvé la pilule (abortive). J’ai compris que nous, les personnes qui tombons enceintes en Pologne, nous ne savions rien de tout ça ! »
Avec cette pilule abortive, facile à prendre et à moindre coût, la militante pense avoir trouvé la solution pour affronter des politiques toujours plus restrictives vis-à-vis de l’interruption volontaire de grossesse en Pologne. « J’ai donc décidé de partager mon expérience. Et en montrant que je suis celle qui a avorté, j’ai donné un visage à la lutte », poursuit-elle, convaincue de la force de sa parole et de celles de ses amies militantes.
« On peut avoir une vie après l’avortement »
C’est ainsi que Justyna Wydrzyńska s’est engagée dans près de vingt ans de lutte pour un meilleur accès à l’avortement. En 2016, à l’heure de la première « protestation noire », qui avait réuni des milliers de Polonaises dans les rues pour manifester contre le premier projet de loi menaçant le droit à l’avortement, elle décide de créer l’ONG Abortion Dream Team. L’association avait pour but de faire connaître la pilule abortive et accompagner les Polonaises dans leur choix d’avorter. Mais en octobre 2020, le tribunal constitutionnel polonais restreint définitivement l’avortement en supprimant son recours en cas de malformation du fœtus. Et avec cette loi, aider une femme à avorter devient un crime.
Cette quasi-interdiction, qui entrera en vigueur en janvier 2021, va motiver Justyna Wydrzyńska et Abortion Dream Team à étendre leur action au niveau européen. En ralliant le collectif Avortement sans Frontière, l’ONG finance et organise des voyages dans les pays voisins pour faciliter une interruption volontaire de grossesse. En 2024, 47 000 femmes ont ainsi pu avorter. « On peut avoir une vie après l’avortement. Une vie très bonne vie même, parce qu’on a décidé de notre propre futur », assume Justyna Wydrzyńska, sans jamais rien regretter de son parcours militant.
Pourtant, la militante reste très critique quant à l’avancée des droits des femmes en Pologne. Selon elle, les politiques progressistes de Donald Tusk ne sont que des promesses. Le Premier ministre, élu il y a deux ans, gouverne avec une très large coalition pour contrer l’extrême droite polonaise. « Depuis, la loi est la même. La situation dans les hôpitaux est la même. Et nous, on dépense toujours plus pour couvrir les coûts des avortements », confie-t-elle. « Tusk dit qu’il est désolé. Très bien. Mais il n’a pas les outils pour en finir avec cette affaire », conclut Justyna Wydrzyńska, convaincue d’avoir l’opinion publique à ses côtés.
« Un modèle pour toutes »
À présent, la militante se prépare à un énième face-à-face avec la justice. Le 30 janvier s’est tenu son procès en appel au tribunal de Varsovie. Les jeunes militantes réunies devant la Cour suprême sont nombreuses ce jour-là.
Les jeunes militantes sont venues nombreuses pour montrer leur soutien à Justyna Wydrzyńska le jour de son procès en appel, le 30 janvier 2025. EMMA LARBI
D’après elles, ce procès ne fait que relancer le combat de Justyna Wydrzyńska. « Elle ne lâche jamais l’affaire et continue d’aider les femmes. Et ça, ça m’inspire beaucoup ! » s’exclame Ania, devant le bâtiment moderne. Cette étudiante de la capitale porte farouchement une pancarte, sur laquelle on peut lire : « Condamnée pour avoir réagi à l’injustice ».
« Les Polonais ne se rendent pas compte à quel point c’est horrible. Aucune femme ne devrait être condamnée pour en aider une autre ! »
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« Pour moi, Justyna est une femme incroyable. C’est juste un modèle pour toutes ici. »
Elle attend la sortie de Justyna Wydrzyńska avec impatience. « On veut lui montrer que beaucoup de gens la supportent », finit-elle, avant de rejoindre la petite foule.
Olga et son amie tendent une pancarte où on peut lire « Quand l’œuf est-il devenu une poule ? » en Polonais, le 30 janvier 2025 à Varsovie. EMMA LARBI
Ce 30 janvier 2025, Justyna Wydrzyńska quitte le tribunal sans verdict, mais pleine d’espoir. Depuis, l’affaire a été renvoyée devant le tribunal du quartier de Praga, à Varsovie. Et si la date du nouveau procès n’est pas encore connue, l’opinion publique semble se ranger à ses côtés. D’après un sondage Ipsos mené sur le soutien à l’avortement dans le monde en 2023, 63 % des Polonais seraient favorables à la légalisation de l’IVG.
En étant la première femme jugée pour « aide à l’avortement » depuis sa quasi-interdiction en Pologne en 2021, Justyna Wydrzynska est devenue un symbole de la lutte pour le droit des femmes dans son pays. Son procès en appel relance les débats sur sa condamnation et ravive l’espoir des jeunes militantes pro-IVG.
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Il y a cinq ans, cette militante pro-IVG est venue en aide à une femme qui souhaitait avorter. « La jeune femme était enceinte de 12 semaines. Son mari n’était pas d’accord avec sa décision d’avorter. Elle avait si peur. Alors je lui ai donné mes propres pilules abortives », déroule-t-elle.
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« J’ai donné un visage à la lutte »
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« J’ai cherché des solutions et j’ai trouvé la pilule (abortive). J’ai compris que nous, les personnes qui tombons enceintes en Pologne, nous ne savions rien de tout ça ! »
Avec cette pilule abortive, facile à prendre et à moindre coût, la militante pense avoir trouvé la solution pour affronter des politiques toujours plus restrictives vis-à-vis de l’interruption volontaire de grossesse en Pologne. « J’ai donc décidé de partager mon expérience. Et en montrant que je suis celle qui a avorté, j’ai donné un visage à la lutte », poursuit-elle, convaincue de la force de sa parole et de celles de ses amies militantes.
« On peut avoir une vie après l’avortement »
C’est ainsi que Justyna Wydrzyńska s’est engagée dans près de vingt ans de lutte pour un meilleur accès à l’avortement. En 2016, à l’heure de la première « protestation noire », qui avait réuni des milliers de Polonaises dans les rues pour manifester contre le premier projet de loi menaçant le droit à l’avortement, elle décide de créer l’ONG Abortion Dream Team. L’association avait pour but de faire connaître la pilule abortive et accompagner les Polonaises dans leur choix d’avorter. Mais en octobre 2020, le tribunal constitutionnel polonais restreint définitivement l’avortement en supprimant son recours en cas de malformation du fœtus. Et avec cette loi, aider une femme à avorter devient un crime.
Cette quasi-interdiction, qui entrera en vigueur en janvier 2021, va motiver Justyna Wydrzyńska et Abortion Dream Team à étendre leur action au niveau européen. En ralliant le collectif Avortement sans Frontière, l’ONG finance et organise des voyages dans les pays voisins pour faciliter une interruption volontaire de grossesse. En 2024, 47 000 femmes ont ainsi pu avorter. « On peut avoir une vie après l’avortement. Une vie très bonne vie même, parce qu’on a décidé de notre propre futur », assume Justyna Wydrzyńska, sans jamais rien regretter de son parcours militant.
Pourtant, la militante reste très critique quant à l’avancée des droits des femmes en Pologne. Selon elle, les politiques progressistes de Donald Tusk ne sont que des promesses. Le Premier ministre, élu il y a deux ans, gouverne avec une très large coalition pour contrer l’extrême droite polonaise. « Depuis, la loi est la même. La situation dans les hôpitaux est la même. Et nous, on dépense toujours plus pour couvrir les coûts des avortements », confie-t-elle. « Tusk dit qu’il est désolé. Très bien. Mais il n’a pas les outils pour en finir avec cette affaire », conclut Justyna Wydrzyńska, convaincue d’avoir l’opinion publique à ses côtés.
« Un modèle pour toutes »
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Les jeunes militantes sont venues nombreuses pour montrer leur soutien à Justyna Wydrzyńska le jour de son procès en appel, le 30 janvier 2025. EMMA LARBI
D’après elles, ce procès ne fait que relancer le combat de Justyna Wydrzyńska. « Elle ne lâche jamais l’affaire et continue d’aider les femmes. Et ça, ça m’inspire beaucoup ! » s’exclame Ania, devant le bâtiment moderne. Cette étudiante de la capitale porte farouchement une pancarte, sur laquelle on peut lire : « Condamnée pour avoir réagi à l’injustice ».
« Les Polonais ne se rendent pas compte à quel point c’est horrible. Aucune femme ne devrait être condamnée pour en aider une autre ! »
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Elle attend la sortie de Justyna Wydrzyńska avec impatience. « On veut lui montrer que beaucoup de gens la supportent », finit-elle, avant de rejoindre la petite foule.
Olga et son amie tendent une pancarte où on peut lire « Quand l’œuf est-il devenu une poule ? » en Polonais, le 30 janvier 2025 à Varsovie. EMMA LARBI
Ce 30 janvier 2025, Justyna Wydrzyńska quitte le tribunal sans verdict, mais pleine d’espoir. Depuis, l’affaire a été renvoyée devant le tribunal du quartier de Praga, à Varsovie. Et si la date du nouveau procès n’est pas encore connue, l’opinion publique semble se ranger à ses côtés. D’après un sondage Ipsos mené sur le soutien à l’avortement dans le monde en 2023, 63 % des Polonais seraient favorables à la légalisation de l’IVG.