Avec l’élection de Ronald Reagan en 1980, un cow-boy déboule à la Maison Blanche
Lorsque Ronald Reagan remporte l’élection de novembre 1980, après deux mandats de gouverneur de Californie et deux candidatures ratées à la présidentielle, le pays est en proie au doute.
Ronald Reagan dans les Montagnes Blanches. GALEN ROWELL/CORBIS VIA GETTY IMAGES
L’économie a été durement frappée par les chocs pétroliers de 1973 et 1979. Le chômage s’envole. La guerre du Vietnam a laissé derrière elle un goût d’humiliation. La menace soviétique étend son ombre. L’ex-acteur hollywoodien, lui, ne doute pas. Pas une seconde. Les Américains veulent croire en ce président qui leur promet – bien avant Trump, qui a recyclé son slogan – de « rendre sa grandeur à l’Amérique » (« Make America Great Again »).
« La droite américaine y a vu la réaffirmation de la puissance des Etats-Unis après la défaite au Vietnam », explique l’historien Doug Rossinow, auteur de « The Reagan Era. A History of the 1980s » (Columbia University Press, 2015, non traduit). De fait, après huit ans de pouvoir, quand il tirera solennellement sa révérence depuis le bureau Ovale, Reagan lancera d’une voix semblant aujourd’hui sortie d’un 33-tours : « My fellow Americans, nous voulions changer une nation, et nous avons changé un monde. »
Aussi arrogant soit-il, le constat se révèle juste. Aujourd’hui, le 40e président américain n’est pas seulement devenu une icône dans son pays, le père de la renaissance conservatrice, la personnification du patriotisme yankee et le héraut de la liberté individuelle. Il reste aussi, dans la mémoire collective, l’inspirateur du néolibéralisme effréné qui a balayé la planète à partir des années 1980, le champion de la démocratie qui a précipité la fin de l’URSS, et l’incarnation du triomphe du capitalisme américain sur le communisme soviétique.
« Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème »
Dès son accession au pouvoir, Reagan renoue avec l’impérialisme américain en imposant sa vision de la liberté – notamment par la puissance militaire. L’après-chocs pétroliers sonne comme la revanche des économistes libéraux sur les keynésiens. L’Ecole de Chicago devient la nouvelle bible, renvoyant aux livres d’histoire les politiques d’Etat-providence et de redistribution des richesses du New Deal des années 1930.
« Il l’a accueillie comme une révélation. Réduire la réglementation, diminuer les impôts, abaisser les barrières commerciales et le génie du capitalisme serait libéré, le rêve américain restauré », écrit Kevin Boyle dans le « New York Times » en 2022. En témoigne sa formule devenue célèbre : « Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème. »
L’heure américaine est à la désindustrialisation, aux cadeaux fiscaux faits aux plus riches, au règne de la finance, à la mondialisation extrême : ce sont les « Reaganomics ». Illustration spectaculaire : le 3 août 1981, les aiguilleurs du ciel se mettent en grève, paralysant les vols. Le président menace de renvoyer ceux qui n’auront pas repris le travail sous quarante-huit heures. Le 5 août, plus de 11 000 aiguilleurs perdent leur emploi.
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Série
1983. Mitterrand et le dilemme de la rigueur : « changer la vie » ou « tenir la monnaie » ?
La révolution Reagan a des conséquences durables pour le pays. « Sous sa direction, la vision que les Américains ont d’eux-mêmes, de leur monde et de leurs responsabilités a évolué », écrit l’historienne Diane Winston dans « Righting the American Dream : How the Media Mainstreamed Reagan’s Evangelical Vision » (University of Chicago Press, 2023, non traduit).
Le libre-marché s’impose comme l’idéologie dominante. Elle se diffuse même en Amérique latine, toutefois moins par choix que par contrainte, car les Etats sont forcés d’appliquer les recettes libérales pour réduire leurs dettes qui flambent… sous l’effet de la hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis.
« Faire du marxisme-léninisme un tas de cendres »
« Rétrospectivement, on peut considérer que le néolibéralisme a été pour l’Amérique un moyen d’étendre sa puissance dans le monde et de l’emporter sur l’Union soviétique. Mais je ne suis pas sûr que Reagan l’ait perçu ainsi », relève Doug Rossinow. Il a réussi son pari. Le fait est que l’Amérique de Reagan fait rêver.
L’ancien cow-boy de westerns, « le grand communicant », comme il est souvent surnommé, sait à merveille user de son aura, véhiculer son message, repackager l’American Dream pour le rendre attractif.
Avec l’élection de Ronald Reagan en 1980, un cow-boy déboule à la Maison Blanche
Lorsque Ronald Reagan remporte l’élection de novembre 1980, après deux mandats de gouverneur de Californie et deux candidatures ratées à la présidentielle, le pays est en proie au doute.
Ronald Reagan dans les Montagnes Blanches. GALEN ROWELL/CORBIS VIA GETTY IMAGES
L’économie a été durement frappée par les chocs pétroliers de 1973 et 1979. Le chômage s’envole. La guerre du Vietnam a laissé derrière elle un goût d’humiliation. La menace soviétique étend son ombre. L’ex-acteur hollywoodien, lui, ne doute pas. Pas une seconde. Les Américains veulent croire en ce président qui leur promet – bien avant Trump, qui a recyclé son slogan – de « rendre sa grandeur à l’Amérique » (« Make America Great Again »).
« La droite américaine y a vu la réaffirmation de la puissance des Etats-Unis après la défaite au Vietnam », explique l’historien Doug Rossinow, auteur de « The Reagan Era. A History of the 1980s » (Columbia University Press, 2015, non traduit). De fait, après huit ans de pouvoir, quand il tirera solennellement sa révérence depuis le bureau Ovale, Reagan lancera d’une voix semblant aujourd’hui sortie d’un 33-tours : « My fellow Americans, nous voulions changer une nation, et nous avons changé un monde. »
Aussi arrogant soit-il, le constat se révèle juste. Aujourd’hui, le 40e président américain n’est pas seulement devenu une icône dans son pays, le père de la renaissance conservatrice, la personnification du patriotisme yankee et le héraut de la liberté individuelle. Il reste aussi, dans la mémoire collective, l’inspirateur du néolibéralisme effréné qui a balayé la planète à partir des années 1980, le champion de la démocratie qui a précipité la fin de l’URSS, et l’incarnation du triomphe du capitalisme américain sur le communisme soviétique.
« Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème »
Dès son accession au pouvoir, Reagan renoue avec l’impérialisme américain en imposant sa vision de la liberté – notamment par la puissance militaire. L’après-chocs pétroliers sonne comme la revanche des économistes libéraux sur les keynésiens. L’Ecole de Chicago devient la nouvelle bible, renvoyant aux livres d’histoire les politiques d’Etat-providence et de redistribution des richesses du New Deal des années 1930.
« Il l’a accueillie comme une révélation. Réduire la réglementation, diminuer les impôts, abaisser les barrières commerciales et le génie du capitalisme serait libéré, le rêve américain restauré », écrit Kevin Boyle dans le « New York Times » en 2022. En témoigne sa formule devenue célèbre : « Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème. »
L’heure américaine est à la désindustrialisation, aux cadeaux fiscaux faits aux plus riches, au règne de la finance, à la mondialisation extrême : ce sont les « Reaganomics ». Illustration spectaculaire : le 3 août 1981, les aiguilleurs du ciel se mettent en grève, paralysant les vols. Le président menace de renvoyer ceux qui n’auront pas repris le travail sous quarante-huit heures. Le 5 août, plus de 11 000 aiguilleurs perdent leur emploi.
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Le libre-marché s’impose comme l’idéologie dominante. Elle se diffuse même en Amérique latine, toutefois moins par choix que par contrainte, car les Etats sont forcés d’appliquer les recettes libérales pour réduire leurs dettes qui flambent… sous l’effet de la hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis.
« Faire du marxisme-léninisme un tas de cendres »
« Rétrospectivement, on peut considérer que le néolibéralisme a été pour l’Amérique un moyen d’étendre sa puissance dans le monde et de l’emporter sur l’Union soviétique. Mais je ne suis pas sûr que Reagan l’ait perçu ainsi », relève Doug Rossinow. Il a réussi son pari. Le fait est que l’Amérique de Reagan fait rêver.
L’ancien cow-boy de westerns, « le grand communicant », comme il est souvent surnommé, sait à merveille user de son aura, véhiculer son message, repackager l’American Dream pour le rendre attractif.
Avec l’élection de Ronald Reagan en 1980, un cow-boy déboule à la Maison Blanche
Lorsque Ronald Reagan remporte l’élection de novembre 1980, après deux mandats de gouverneur de Californie et deux candidatures ratées à la présidentielle, le pays est en proie au doute.
Ronald Reagan dans les Montagnes Blanches. GALEN ROWELL/CORBIS VIA GETTY IMAGES
L’économie a été durement frappée par les chocs pétroliers de 1973 et 1979. Le chômage s’envole. La guerre du Vietnam a laissé derrière elle un goût d’humiliation. La menace soviétique étend son ombre. L’ex-acteur hollywoodien, lui, ne doute pas. Pas une seconde. Les Américains veulent croire en ce président qui leur promet – bien avant Trump, qui a recyclé son slogan – de « rendre sa grandeur à l’Amérique » (« Make America Great Again »).
« La droite américaine y a vu la réaffirmation de la puissance des Etats-Unis après la défaite au Vietnam », explique l’historien Doug Rossinow, auteur de « The Reagan Era. A History of the 1980s » (Columbia University Press, 2015, non traduit). De fait, après huit ans de pouvoir, quand il tirera solennellement sa révérence depuis le bureau Ovale, Reagan lancera d’une voix semblant aujourd’hui sortie d’un 33-tours : « My fellow Americans, nous voulions changer une nation, et nous avons changé un monde. »
Aussi arrogant soit-il, le constat se révèle juste. Aujourd’hui, le 40e président américain n’est pas seulement devenu une icône dans son pays, le père de la renaissance conservatrice, la personnification du patriotisme yankee et le héraut de la liberté individuelle. Il reste aussi, dans la mémoire collective, l’inspirateur du néolibéralisme effréné qui a balayé la planète à partir des années 1980, le champion de la démocratie qui a précipité la fin de l’URSS, et l’incarnation du triomphe du capitalisme américain sur le communisme soviétique.
« Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème »
Dès son accession au pouvoir, Reagan renoue avec l’impérialisme américain en imposant sa vision de la liberté – notamment par la puissance militaire. L’après-chocs pétroliers sonne comme la revanche des économistes libéraux sur les keynésiens. L’Ecole de Chicago devient la nouvelle bible, renvoyant aux livres d’histoire les politiques d’Etat-providence et de redistribution des richesses du New Deal des années 1930.
« Il l’a accueillie comme une révélation. Réduire la réglementation, diminuer les impôts, abaisser les barrières commerciales et le génie du capitalisme serait libéré, le rêve américain restauré », écrit Kevin Boyle dans le « New York Times » en 2022. En témoigne sa formule devenue célèbre : « Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème. »
L’heure américaine est à la désindustrialisation, aux cadeaux fiscaux faits aux plus riches, au règne de la finance, à la mondialisation extrême : ce sont les « Reaganomics ». Illustration spectaculaire : le 3 août 1981, les aiguilleurs du ciel se mettent en grève, paralysant les vols. Le président menace de renvoyer ceux qui n’auront pas repris le travail sous quarante-huit heures. Le 5 août, plus de 11 000 aiguilleurs perdent leur emploi.
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Le libre-marché s’impose comme l’idéologie dominante. Elle se diffuse même en Amérique latine, toutefois moins par choix que par contrainte, car les Etats sont forcés d’appliquer les recettes libérales pour réduire leurs dettes qui flambent… sous l’effet de la hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis.
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« Rétrospectivement, on peut considérer que le néolibéralisme a été pour l’Amérique un moyen d’étendre sa puissance dans le monde et de l’emporter sur l’Union soviétique. Mais je ne suis pas sûr que Reagan l’ait perçu ainsi », relève Doug Rossinow. Il a réussi son pari. Le fait est que l’Amérique de Reagan fait rêver.
L’ancien cow-boy de westerns, « le grand communicant », comme il est souvent surnommé, sait à merveille user de son aura, véhiculer son message, repackager l’American Dream pour le rendre attractif.
Avec l’élection de Ronald Reagan en 1980, un cow-boy déboule à la Maison Blanche
Lorsque Ronald Reagan remporte l’élection de novembre 1980, après deux mandats de gouverneur de Californie et deux candidatures ratées à la présidentielle, le pays est en proie au doute.
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L’économie a été durement frappée par les chocs pétroliers de 1973 et 1979. Le chômage s’envole. La guerre du Vietnam a laissé derrière elle un goût d’humiliation. La menace soviétique étend son ombre. L’ex-acteur hollywoodien, lui, ne doute pas. Pas une seconde. Les Américains veulent croire en ce président qui leur promet – bien avant Trump, qui a recyclé son slogan – de « rendre sa grandeur à l’Amérique » (« Make America Great Again »).
« La droite américaine y a vu la réaffirmation de la puissance des Etats-Unis après la défaite au Vietnam », explique l’historien Doug Rossinow, auteur de « The Reagan Era. A History of the 1980s » (Columbia University Press, 2015, non traduit). De fait, après huit ans de pouvoir, quand il tirera solennellement sa révérence depuis le bureau Ovale, Reagan lancera d’une voix semblant aujourd’hui sortie d’un 33-tours : « My fellow Americans, nous voulions changer une nation, et nous avons changé un monde. »
Aussi arrogant soit-il, le constat se révèle juste. Aujourd’hui, le 40e président américain n’est pas seulement devenu une icône dans son pays, le père de la renaissance conservatrice, la personnification du patriotisme yankee et le héraut de la liberté individuelle. Il reste aussi, dans la mémoire collective, l’inspirateur du néolibéralisme effréné qui a balayé la planète à partir des années 1980, le champion de la démocratie qui a précipité la fin de l’URSS, et l’incarnation du triomphe du capitalisme américain sur le communisme soviétique.
« Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème »
Dès son accession au pouvoir, Reagan renoue avec l’impérialisme américain en imposant sa vision de la liberté – notamment par la puissance militaire. L’après-chocs pétroliers sonne comme la revanche des économistes libéraux sur les keynésiens. L’Ecole de Chicago devient la nouvelle bible, renvoyant aux livres d’histoire les politiques d’Etat-providence et de redistribution des richesses du New Deal des années 1930.
« Il l’a accueillie comme une révélation. Réduire la réglementation, diminuer les impôts, abaisser les barrières commerciales et le génie du capitalisme serait libéré, le rêve américain restauré », écrit Kevin Boyle dans le « New York Times » en 2022. En témoigne sa formule devenue célèbre : « Le gouvernement n’est pas la solution, il est le problème. »
L’heure américaine est à la désindustrialisation, aux cadeaux fiscaux faits aux plus riches, au règne de la finance, à la mondialisation extrême : ce sont les « Reaganomics ». Illustration spectaculaire : le 3 août 1981, les aiguilleurs du ciel se mettent en grève, paralysant les vols. Le président menace de renvoyer ceux qui n’auront pas repris le travail sous quarante-huit heures. Le 5 août, plus de 11 000 aiguilleurs perdent leur emploi.
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Le libre-marché s’impose comme l’idéologie dominante. Elle se diffuse même en Amérique latine, toutefois moins par choix que par contrainte, car les Etats sont forcés d’appliquer les recettes libérales pour réduire leurs dettes qui flambent… sous l’effet de la hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis.
« Faire du marxisme-léninisme un tas de cendres »
« Rétrospectivement, on peut considérer que le néolibéralisme a été pour l’Amérique un moyen d’étendre sa puissance dans le monde et de l’emporter sur l’Union soviétique. Mais je ne suis pas sûr que Reagan l’ait perçu ainsi », relève Doug Rossinow. Il a réussi son pari. Le fait est que l’Amérique de Reagan fait rêver.
L’ancien cow-boy de westerns, « le grand communicant », comme il est souvent surnommé, sait à merveille user de son aura, véhiculer son message, repackager l’American Dream pour le rendre attractif.